• L'AN NEUF DE L'HEGIRE


    Comme s'il pressentait que son heure était proche,
    Grave, il ne faisait plus à personne une reproche ;
    Il marchait en rendant aux passants leur salut ;
    On le voyait vieillir chaque jour, quoiqu'il eût
    A peine vingt poils blancs à sa barbe encore noire ;
    Il s'arrêtait parfois pour voir les chameaux boire,
    Se souvenant du temps qu'il était chamelier.
    Il semblait avoir vu l'Eden, l'âge de d'amour,
    Les temps antérieurs, l'ère immémoriale.

    Il avait le front haut, la joue impériale,
    Le sourcil chauve, l'œil profond et diligent,
    Le cou pareil au col d'une amphore d'argent,
    L'air d'un Noé qui sait le secret du déluge.
    Si des hommes venaient le consulter, ce juge
    Laissait l'un affirmer, l'autre rire et nier,
    Ecoutait en silence et parlait le dernier.
    Sa bouche était toujours en train d'une prière ;
    Il mangeait peu, serrant sur son ventre une pierre ;
    Il s'occupait de lui-même à traire ses brebis ;
    Il s'asseyait à terre et cousait ses habits.
    Il jeûnait plus longtemps qu'autrui les jours de jeûne,
    Quoiqu'il perdît sa force et qu'il ne fût plus jeune.
    A soixante-trois ans une fièvre le prit.
    Il relut le Coran de sa main même écrit,
    Puis il remit au fils de Séid la bannière,
    En lui disant : " Je touche à mon aube dernière.
    Il n'est pas d'autre Dieu que Dieu. Combats pour lui. "
    Et son œil, voilé d'ombre, avait ce morne ennui
    D'un vieux aigle forcé d'abandonner son aire.

    Il vint à la mosquée à son heure ordinaire,
    Appuyé sur Ali le peuple le suivant ;
    Et l'étendard sacré se déployait au vent.
    Là, pâle, il s'écria, se tournant vers la foule ;
    " Peuple, le jour s'éteint, l'homme passe et s'écroule ;
    La poussière et la nuit, c'est nous. Dieu seul est grand.
    Peuple je suis l'aveugle et suis l'ignorant.
    Sans Dieu je serais vil plus que la bête immonde. "

    Un cheikh lui dit : " o chef des vrais croyants ! le monde,
    Sitôt qu'il t'entendit, en ta parole crut ;
    Le jour où tu naquit une étoile apparut,
    Et trois tours du palais de Chosroès tombèrent. "
    Lui, reprit : " Sur ma mort les Anges délibèrent ;
    L'heure arrive. Ecoutez. Si j'ai de l'un de vous
    Mal parlé, qu'il se lève, ô peuple, et devant tous
    Qu'il m'insulte et m'outrage avant que je m'échappe ;
    Si j'ai frappé quelqu'un, que celui-là me frappe. "
    Et, tranquille, il tendit aux passants son bâton.
    Une vieille, tondant la laine d'un mouton,
    Assise sur un seuil, lui cria : " Dieu t'assiste ! "
    Il semblait regarder quelque vision triste,
    Et songeait ; tout à coup, pensif, il dit : " voilà,
    Vous tous, je suis un mot dans la bouche d'Allah ;
    Je suis cendre comme homme et feu comme prophète.
    J'ai complété d'Issa la lumière imparfaite.
    Je suis la force, enfants ; Jésus fut la douceur.
    Le soleil a toujours l'aube pour précurseur.
    Jésus m'a précédé, mais il n'est pas la Cause.
    Il est né d'une Vierge aspirant une rose.
    Moi, comme être vivant, retenez bien ceci,
    Je ne suis qu'un limon par les vices noirci ;
    J'ai de tous les péchés subi l'approche étrange ;
    Ma chair a plus d'affront qu'un chemin n'a de fange,
    Et mon corps par le mal est tout déshonoré ;
    O vous tous, je serais bien vite dévoré
    Si dans l'obscurité du cercueil solitaire
    Chaque faute engendre un ver de terre.
    Fils, le damné renaît au fond du froid caveau
    Pour être par les vers dévoré de nouveau ;
    Toujours sa chair revit, jusqu'à ce que la peine,
    Finie ouvre à son vol l'immensité sereine.
    Fils, je suis le champ vil des sublimes combats,
    Tantôt l'homme d'en haut, tantôt l'homme d'en bas,
    Et le mal dans ma bouche avec le bien alterne
    Comme dans le désert le sable et la citerne ;
    Ce qui n'empêche pas que je n'aie, ô croyants !
    Tenu tête dans l'ombre au x Anges effrayants
    Qui voudraient replonger l'homme dans les ténèbres ;
    J'ai parfois dans mes poings tordu leurs bras funèbres ;
    Souvent, comme Jacob, j'ai la nuit, pas à pas,
    Lutté contre quelqu'un que je ne voyais pas ;
    Mais les hommes surtout on fait saigner ma vie ;
    Ils ont jeté sur moi leur haine et leur envie,
    Et, comme je sentais en moi la vérité,
    Je les ai combattus, mais sans être irrité,
    Et, pendant le combat je criais : " laissez faire !
    Je suis le seul, nu, sanglant, blessé ; je le préfère.
    Qu'ils frappent sur moi tous ! Que tout leur soit permis !
    Quand même, se ruant sur moi, mes ennemis
    Auraient, pour m'attaquer dans cette voie étroite,
    Le soleil à leur gauche et la lune à leur droite,
    Ils ne me feraient point reculer ! " C'est ainsi
    Qu'après avoir lutté quarante ans, me voici
    Arrivé sur le bord de la tombe profonde,
    Et j'ai devant moi Allah, derrière moi le monde.
    Quant à vous qui m'avez dans l'épreuve suivi,
    Comme les grecs Hermès et les hébreux Lévi,
    Vous avez bien souffert, mais vous verrez l'aurore.
    Après la froide nuit, vous verrez l'aube éclore ;
    Peuple, n'en doutez pas ; celui qui prodigua
    Les lions aux ravins du Jebbel-Kronnega,
    Les perles à la mer et les astres à l'ombre,
    Peut bien donner un peu de joie à l'homme sombre. "

    Il ajouta ; " Croyez, veillez ; courbez le front.
    Ceux qui ne sont ni bons ni mauvais resteront
    Sur le mur qui sépare Eden d'avec l'abîme,
    Etant trop noirs pour Dieu, mais trop blancs pour le crime ;
    Presque personne n'est assez pur de péchés
    Pour ne pas mériter un châtiment ; tâchez,
    En priant, que vos corps touchent partout la terre ;
    L'enfer ne brûlera dans son fatal mystère
    Que ce qui n'aura point touché la cendre, et Dieu
    A qui baise la terre obscure, ouvre un ciel bleu ;
    Soyez hospitaliers ; soyez saints ; soyez justes ;
    Là-haut sont les fruits purs dans les arbres augustes,
    Les chevaux sellés d'or, et, pour fuir aux sept dieux,
    Les chars vivants ayant des foudres pour essieux ;
    Chaque houri, sereine, incorruptible, heureuse,
    Habite un pavillon fait d'une perle creuse ;
    Le Gehennam attend les réprouvés ; malheur !
    Ils auront des souliers de feu dont la chaleur
    Fera bouillir leur tête ainsi qu'une chaudière.
    La face des élus sera charmante et fière. "
    Il s'arrêta donnant audience à l'espoir.
    Puis poursuivant sa marche à pas lents, il reprit :

    " O vivants ! Je répète à tous que voici l'heure
    Où je vais me cacher dans une autre demeure ;
    Donc, hâtez-vous. Il faut, le moment est venu,
    Que je sois dénoncé par ceux qui m'ont connu,
    Et que, si j'ai des torts, on me crache aux visages. "
    La foule s'écartait muette à son passage.
    Il se lava la barbe au puits d'Aboufléia.
    Un homme réclama trois drachmes, qu'il paya,
    Disant : " Mieux vaut payer ici que dans la tombe. "
    L'œil du peuple était doux comme un œil de colombe
    En le regardant cet homme auguste, son appui ;
    Tous pleuraient ; quand, plus tard, il fut rentré chez lui,
    Beaucoup restèrent là sans fermer la paupière,
    Et passèrent la nuit couchés sur une pierre
    Le lendemain matin, voyant l'aube arriver ;
    " Aboubékre, dit-il, je ne puis me lever,
    Tu vas prendre le livre et faire la prière. "
    Et sa femme Aïscha se tenait en arrière ;
    Il écoutait pendant qu'Aboubékre lisait,
    Et souvent à voix basse achevait le verset ;
    Et l'on pleurait pendant qu'il priait de la sorte.
    Et l'Ange de la mort vers le soir à la porte
    Apparut, demandant qu'on lui permît d'entrer.

    " Qu'il entre. " On vit alors son regard s'éclairer
    De la même clarté qu'au jour de sa naissance ;
    Et l'Ange lui dit : " Dieu désire ta présence.
    - Bien ", dit-il. Un frisson sur les tempes courut,

    Un souffle ouvrit sa lèvre, et Mahomet mourut.


    Victor Hugo, le 15 janvier 1858.


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  • L'épée de Mahomet
    publié le lundi 25 septembre 2006

    Uri Avnery


     


    Le discours du pape de la semaine dernière, qui a soulevé une tempête dans le monde entier, allait bien avec la croisade de Bush contre l'« islamofascisme », dans le contexte du « choc des civilisations ».
     
    Depuis l'époque où les empereurs romains livraient les chrétiens aux lions, les relations entre les empereurs et les chefs de l'Eglise ont subi de nombreux changements.
    Constantin le Grand, qui est devenu empereur en l'an 306 - il y a exactement 1.700 ans - a encouragé la pratique du christianisme dans l'Empire, qui comprenait la Palestine. Des siècles plus tard, l'Eglise s'est scindée entre une partie orientale (orthodoxe) et une partie occidentale (catholique). A l'ouest, l'évêque de Rome, qui a pris le titre de pape, a exigé que l'empereur accepte de reconnaître sa supériorité.
    La lutte entre les empereurs et les papes a joué un rôle central dans l'histoire européenne et a divisé les peuples. Elle a connu des hauts et des bas. Des empereurs ont destitué ou expulsé un pape, des papes ont destitué ou excommunié un empereur. L'un des empereurs, Henri IV, est « allé à Canossa », restant pendant trois jours pieds nus dans la neige devant le palais papal jusqu'à ce que le pape daigne annuler son excommunication.

    Mais il y a eu des périodes où les empereurs et les papes ont vécu en paix. Nous sommes témoins d'une telle période aujourd'hui. Entre le pape actuel, Benoît XVI, et l'empereur actuel, George Bush II, il existe une merveilleuse harmonie. Le discours du pape de la semaine dernière, qui a soulevé une tempête dans le monde entier, allait bien avec la croisade de Bush contre l'« islamofascisme », dans le contexte du « choc des civilisations ».

    LORS DE SA CONFÉRENCE dans une université allemande, le 265e pape a exposé ce qu'il voit comme une énorme différence entre le christianisme et l'islam : alors que le christianisme est basé sur la raison, l'islam la refuse. Alors que les chrétiens voient une logique dans les actions de Dieu, les musulmans refusent de chercher la logique dans les actions d'Allah.En tant qu'athée juif, je n'entends pas entrer dans ce débat. Comprendre la logique du pape dépasse mes modestes capacités. Mais je ne peux ignorer un passage qui me concerne aussi en tant qu'Israélien vivant près de la ligne de faille de cette « guerre des civilisations ».

    Pour prouver l'absence de raison dans l'islam, le pape affirme que le prophète Mahomet ordonnait à ses disciples de propager leur religion par l'épée. Selon le pape, c'est déraisonnable, parce que la foi naît de l'âme, pas du corps. Comment l'épée peut-elle influer sur l'âme ?

    Pour étayer son propos, le pape cite - parmi tous - un empereur byzantin qui appartenait bien sûr à l'Eglise orientale concurrente. A la fin du XIVe siècle, l'empereur Manuel II Paléologue a parlé d'un débat qu'il avait eu - c'est du moins ce qu'il a dit (on peut en douter) - avec un érudit musulman perse qu'il ne nomme pas. Dans la chaleur de la discussion, l'empereur (toujours selon lui) a lancé les paroles suivantes à son adversaire :: « Montrez- moi seulement ce que Mahomet a apporté de nouveau, et vous ne trouverez que des choses maléfiques et inhumaines, telles que son ordre de propager par l'épée la foi qu'il prêchait. »

    Ces paroles soulèvent trois questions : (a) Pourquoi l'empereur les a-t-il prononcées ? (b) Sont-elles authentiques ? (c) Pourquoi le pape actuel les cite-t-il ?

    QUAND MANUEL II a écrit son traité, il était à la tête d'un empire agonisant. Il assurait le pouvoir en 1391, date à laquelle il ne restait que quelques provinces de son empire autrefois glorieux. Et même celles-ci étaient déjà sous la menace turque.A cette époque précise, les Turcs ottomans avaient atteint les rives du Danube. Ils avaient conquis la Bulgarie et le nord de la Grèce, et avaient deux fois vaincu des armées envoyées en renfort par l'Europe pour sauver l'empire oriental. Le 29 mai 1453, quelques années seulement après la mort de Manuel, la capitale, Constantinople (l'actuelle Istamboul) est tombée aux mains des Turcs, ce qui a mis fin à l'Empire qui avait duré plus de mille ans. Durant son règne, Manuel a fait le tour des capitales de l'Europe pour tenter d'obtenir un soutien. Il a promis de réunifier l'Eglise. Il ne fait aucun doute qu'il a écrit son traité religieux pour inciter les pays chrétiens à se dresser contre les Turcs et pour les convaincre de lancer une nouvelle croisade. Le but était pratique. La théologie servait la politique.

    En ce sens, la citation répond exactement aux exigences de l'empereur actuel, George Bush II. Lui aussi veut unir le monde chrétien contre l'« Axe du Mal », en majorité musulman. De surcroît, les Turcs frappent de nouveau aux portes de l'Europe, pacifiquement cette fois. On sait bien que le pape soutient les forces qui s'opposent à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Y A T-IL une quelconque vérité dans les propos de Manuel ?

    Le pape lui-même a dit des mots de prudence. En tant que théologien sérieux et reconnu, il ne pouvait pas se permettre de falsifier des textes écrits. Donc il a admis que le Coran interdit formellement la propagation de la foi par la force. Il a cité la deuxième sourate, verset 256 (étrangement faillible pour un pape, il voulait dire verset 257) qui dit : « Il ne doit pas y avoir de coercition en matière de foi. »

    Comment peut-on ignorer une telle déclaration, qui est sans équivoque ? Le pape argue simplement que ce commandement avait été établi par le prophète quand il était au début de sa carrière, encore faible et sans pouvoir. Mais que plus tard il avait ordonné l'usage de l'épée au service de la foi. Un tel ordre n'existe pas dans le Coran. Certes, Mahomet a appelé à l'usage de l'épée dans sa guerre contre les tribus rivales - chrétiens, juifs et autres - en Arabie, quand il était en train de bâtir son Etat. Mais c'était un acte politique, pas un acte religieux ; fondamentalement un combat pour conquérir du territoire, non pour propager la foi. Jésus a dit : « Vous les reconnaîtrez à leurs fruits ». Le traitement des autres religions par l'Islam doit être jugé à ses actes : comment les dirigeants musulmans se sont-ils conduits pendant plus de mille ans quand ils avaient le pouvoir de « propager la foi par l'épée » ? Eh bien, ils ne l'ont tout simplement pas fait. Pendant des siècles, les musulmans ont gouverné la Grèce. Les Grecs sont-ils devenus musulmans ? Quelqu'un a-t-il même essayé de les islamiser ? Au contraire, les Grecs chrétiens occupaient les plus hautes positions dans l'administration ottomane. Les Bulgares, les Serbes, les Roumains, les Hongrois et les autres nations européennes ont vécu à une époque ou à une autre sous domination ottomane et sont restés fidèles à leur foi chrétienne. Personne ne les a contraints à devenir musulmans et tous sont restés des chrétiens pratiquants.

    Certes, les Albanais se sont convertis à l'islam, de même que les Bosniaques. Mais personne ne prétend qu'ils l'ont fait sous la contrainte. Ils ont adopté l'islam pour obtenir les faveurs du gouvernement et en profiter. En 1099, les Croisés ont conquis Jérusalem et massacré sans discrimination ses habitants musulmans et juifs, au nom du doux Jésus. A l'époque, après 400 ans d'occupation de la Palestine par les musulmans, les chrétiens étaient encore majoritaires dans le pays. Tout au long de cette longue période, on n'avait rien fait pour leur imposer l'Islam. Ce n'est qu'après l'expulsion des croisés du pays que la majorité des habitants ont commencé à adopter la langue arabe et la foi musulmane - et ils étaient les ancêtres de la plupart des Palestiniens d'aujourd'hui.

    IL N'Y A absolument aucune preuve d'une tentative d'imposer l'islam aux juifs. Comme on le sait, sous l'administration musulmane, les juifs d'Espagne ont connu un épanouissement tel qu'ils n'en ont jamais connu ailleurs presque jusqu'à notre époque. Des poètes comme Yehuda Halevy écrivaient en arabe, comme le grand Maïmonide. Dans l'Espagne musulmane, des juifs étaient ministres, poètes, scientifiques. Dans la Tolède musulmane, des érudits chrétiens, juifs et musulmans travaillaient ensemble et traduisaient les anciens textes philosophiques et scientifiques grecs. C'était vraiment l'Age d'or. Comment cela aurait-il été possible si le Prophète avait décrété la « propagation de la foi par l'épée » ?

    Ce qui s'est passé par la suite est encore plus parlant. Quand les catholiques ont reconquis l'Espagne sur les musulmans, ils ont institué un règne de terreur religieuse. Les juifs et les musulmans se sont trouvés face à un choix cruel : devenir chrétiens, être massacrés ou partir. Et où sont donc partis les centaines de milliers de juifs qui refusaient d'abandonner leur foi ? Presque tous ont été reçus à bras ouverts dans les pays musulmans. Les juifs séfarades (espagnols) se sont installés dans tout le monde musulman, du Maroc à l'ouest à l'Irak à l'est. De la Bulgarie (alors partie de l'empire ottoman) au nord au Soudan au sud. Nulle part ils n'ont été persécutés. Ils n'ont rien connu de tel que les tortures de l'Inquisition, les flammes de l'Autodafé, les pogroms, les terribles expulsions de masse qui ont eu lieu dans presque tous les pays chrétiens jusqu'à l'Holocauste.

    POURQUOI ? Parce que l'islam interdisait expressément toute persécution des « peuples du Livre ». Dans la société islamique, une place spéciale était réservée aux juifs et aux chrétiens. Ils ne jouissaient pas de droits totalement égaux, mais presque. Ils devaient payer des impôts locaux spéciaux, mais étaient exemptés du service militaire - une compensation qui était vraiment tout à fait appréciée par de nombreux juifs. On a dit que des dirigeants musulmans désapprouvaient toute tentative de convertir des juifs à l'islam même par la persuasion, parce que cela représentait une perte d'impôts.

    Tout juif honnête qui connaît l'histoire de son peuple ne peut que ressentir une profonde gratitude envers l'islam qui a protégé les juifs pendant cinquante générations, tandis que le monde chrétien persécutait les juifs et avait essayé maintes fois « par l'épée » de les obliger à abandonner leur foi.

    L'HISTOIRE de « propager la foi par l'épée » est une légende malfaisante, un des mythes qui se sont développés en Europe pendant les grandes guerres contre les musulmans - la reconquista de l'Espagne par les chrétiens, les croisades et le refoulement des Turcs, qui avaient presque conquis Vienne. J'ai le sentiment que le pape allemand aussi croit honnêtement à ces fables. Cela signifie que le chef du monde catholique , lui-même théologien chrétien, n'a pas fait l'effort d'étudier l'histoire des autres religions.

    Pourquoi a-t-il lancé ces mots en public ? Et pourquoi maintenant ?

    On ne peut s'empêcher de les entendre dans le contexte de la nouvelle croisade de Bush et de ses supporters évangélistes, avec ses slogans d'« islamofascisme » et de « guerre globale contre le terrorisme » - où « terrorisme » est devenu synonyme de musulmans. Pour les gens de Bush, c'est une tentative cynique de justifier la domination sur les ressources en pétrole du monde. Ce n'est pas la première fois dans l'histoire qu'on habille d'un costume religieux la nudité des intérêts économiques ; pas la première fois qu'une descente de voleurs devient une croisade.

    Le discours du pape mélange tout. Qui peut en prédire les terribles conséquences ?

    Article publié en hébreu et en anglais sur le site de Gush Shalom le 24 septembre 2006 - Traduit de l'anglais « Muhammad's sword » : RM/SW



     

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